Système de demande d’audit du Comité d’audit et d’inspection de Corée (BAI) et ses implications pour la participation publique

Source : Conseil d’audit et d’inspection (BAI)

Auteur : M. Soungdae Park (Directeur, Division de la demande d’audit 5), Comité d’audit et d’inspection de Corée

L’identification des tendances en matière d’audit du secteur public fait apparaître deux changements principaux en termes de types d’audit et de parties prenantes. De nombreuses institutions supérieures de contrôle (ISC) ont élargi leur champ d’action, passant des audits de conformité aux audits de performance, et ont renforcé leur capacité à répondre aux préoccupations et aux besoins des parties prenantes. Dans le contexte de changements sociaux tels que l’accroissement de la démocratie participative et de l’engagement des citoyens, le Comité d’audit et d’inspection de Corée (BAI) a introduit la demande d’audit pour l’intérêt public (ARPI) en 1996, la demande d’audit par les citoyens (CRA) en 2002 et la demande d’audit de l’Assemblée nationale en 2003. Les systèmes de demande d’audit permettent au BAI de communiquer directement avec le public, alors qu’auparavant, le BAI influençait indirectement le public en se concentrant sur l’audit des agences gouvernementales. Les principales parties prenantes des ISC ne se limitent plus au pouvoir législatif, mais s’étendent désormais à toutes les parties, y compris les agences gouvernementales, les législateurs, les médias, les citoyens et les organisations de la société civile. Cet article présente les systèmes de demande d’audit du BAI et explore ses implications dans le système administratif contemporain.

Systèmes de demande d’audit du BAI

Conformément au « Règlement sur la disposition des demandes d’audit d’intérêt public », le BAI a introduit la demande d’audit d’intérêt public (ARPI) en 1996 pour recevoir des demandes d’audit sur des questions liées à des activités illégales, à la corruption, à la mauvaise administration, au gaspillage de fonds publics, à la violation des intérêts publics, etc. Les citoyens individuels et les organisations de la société civile peuvent présenter des demandes d’audit si le nombre de demandeurs est supérieur à 300 citoyens âgés de 19 ans ou plus. Les directeurs d’entités publiques et de conseils locaux peuvent également demander des audits au BAI. En 2002, la demande d’audit des citoyens (CRA) a été introduite par la « Loi sur la prévention de la corruption ainsi que la création et la gestion de la Commission de lutte contre la corruption et des droits civils ». La CRA permet à un groupe de plus de 300 citoyens âgés de 19 ans ou plus de demander un audit sur des questions liées à une activité illégale et/ou à la corruption d’entités publiques.

Malgré les similitudes entre l’ARPI et la CRA, le BAI maintient les deux canaux car ils sont distincts l’un de l’autre. Par exemple, l’ARPI est plus large que la CRA en termes d’éligibilité des demandeurs et de portée de l’audit, entre autres choses. La CRA se limite aux demandes d’audit sur des questions liées à l’activité illégale et/ou à la corruption des entités publiques, mais l’ARPI couvre en plus les questions liées aux activités déloyales et aux actes répréhensibles des entités publiques. En outre, pour déterminer s’il convient ou non de réaliser un audit sur les questions demandées, dans le cas de l’ARPI, le BAI examine seul si la demande répond aux critères d’éligibilité et aux exigences. En revanche, dans le cas de la CRA, le « Comité d’examen des demandes d’audit », composé de quatre experts externes et de trois cadres du BAI, examine et prend la décision de réaliser ou non un audit sur la question demandée.

Comparaison de la demande d’audit des citoyens et de la demande d’audit des systèmes d’intérêt public

Comparison of the Citizens’ Request for Audit and the Audit Request for Public Interest Systems
Demande d’audit des citoyens (CRA)
Demande d’audit des systèmes d’intérêt public (ARPI)
Base juridiqueLoi sur la prévention de la corruption ainsi que la création et la gestion de l’ACRCIntroduite en 2002Règlement sur la disposition de la demande d’audit d’intérêt publicIntroduit en 1996
DemandeurGroupe de plus de 300 personnesGroupe de plus de 300 personnes CSO dont le nombre de membres est supérieur à 300 Directeurs d’entités publiques Conseils locaux
Motif de la demandeActivité illégale et/ou corruption qui porterait atteinte à l’intérêt public Activité illégale et/ou déloyale qui porterait atteinte à l’intérêt public Gaspillage de fonds publicsMauvaise administration, mauvaise gestion
ExceptionsAffaires faisant l’objet d’une enquête ou d’un procèsAffaires d’intérêt privéAffaires en cours d’auditAffaires concernant des informations classifiées et la sécurité nationaleAffaires relevant de la compétence du gouvernement localAffaires faisant l’objet d’une enquête ou d’un procèsAffaires d’intérêt privéAffaires en cours d’auditAffaires concernant des informations classifiées et la sécurité nationale

Source : site web du Comité d’audit et d’inspection de Corée (BAI).

Depuis son introduction en 2002, le nombre de demandes CRA reçues est assez constant, entre 20 et 40 demandes par an, alors que le nombre d’ARPI reçues est en constante augmentation. Par exemple, le BAI a perçu 16 dossiers ARPI en 1996, 126 dossiers en 2005 et 170 dossiers en 2020. Cette augmentation est en partie attribuée aux conditions d’éligibilité plus larges des ARPI, telles que les demandeurs et les sujets, par rapport aux demandes CRA, ce qui permet au public d’accéder plus facilement aux audits du BAI et de les demander. De 2002 à 2017, le nombre de cas ARPI perçus s’est élevé à 400 – 113 cas étaient liés au secteur de la construction et du transport, 47 cas sur le secteur de l’éducation, 40 cas concernant le secteur financier, 27 cas sur le secteur de l’environnement et 173 cas sur d’autres secteurs. Le BAI a effectué des audits pour 64 cas sur les 400 (26,3 %).

Fig 2: Nombre de cas de demandes d’audit d’intérêt public reçues (ARPI) entre 1996 et 2020

Number of Received Audit Request for Public Interest (ARPI) Cases from 1996 to 2020

Source : Comité d’audit et d’inspection (BAI), Soumissions de cas ARPI. 

Implications

Démocratie participative

Dans une démocratie moderne, les représentants élus devraient être responsables devant les électeurs. Cependant, depuis la fin du 20ème siècle, des critiques ont été formulées selon lesquelles les gouvernements élus n’ont pas réussi à répondre pleinement aux besoins politiques de la population en raison de l’accélération des changements sociaux. Dans un effort de surmonter ce défi de la démocratie représentative, la démocratie participative et la démocratie délibérative ont suscité l’attention. Les systèmes de demande d’audit du BAI ne peuvent pas être considérés comme une participation publique directe, ni comme un contrôle direct du peuple sur l’administration. Cependant, il peut fonctionner comme un outil de renforcement de la démocratie participative dans la mesure où il permet au peuple et à la société civile de s’engager dans le processus décisionnel. Récemment, le BAI a observé une augmentation des demandes d’audit sur des questions locales controversées directement liées aux avantages et à la commodité des résidents locaux. Il s’agit notamment de questions sur l’emplacement d’installations désagréables telles que les décharges, et sur l’opportunité de développer ou de préserver certaines zones. Tout désagrément et/ou mécontentement que les gens éprouvent dans leur vie quotidienne peut accroître leur désir de participer à l’administration et au processus décisionnel. Comme les citoyens s’impliquent dans la correction des actions et décisions administratives illégales ou déraisonnables, le système de demande d’audit du BAI peut être considéré comme un mécanisme permettant aux gens de s’engager activement dans les pratiques démocratiques, un concept souligné par Alexis de Tocqueville.

Fonction d’audit externe

Suite au problème mandant-mandataire, le système de demande d’audit du BAI permet aux gens de demander un audit, à condition qu’il réponde à toutes les conditions d’admissibilité de la demande, et peut être un moyen utile pour les citoyens (les « mandants ») de surveiller et de contrôler le comportement des institutions publiques (les « mandataires »). Un problème mandant-mandataire survient lorsqu’il y a un conflit d’intérêts entre le mandataire et le mandant, ce qui se produit généralement lorsque le mandataire agit uniquement dans son propre intérêt. Le mandataire dispose généralement de plus d’informations que le mandant, et cette asymétrie d’information est l’une des causes fondamentales du problème mandant-mandataire. Cependant, si les mandants peuvent observer et vérifier que les mandataires poursuivent leurs propres intérêts au lieu de ceux des mandants, ces derniers tenteront de contrôler ce comportement. Dans le contexte du système de demande d’audit, une récente augmentation des demandes d’audit peut être interprétée comme le désir des citoyens de surveiller les activités des institutions publiques.

Système de gestion des conflits publics

Les questions controversées sur le plan social peuvent être difficiles à gérer en raison d’intérêts divergents, d’autant plus qu’un nombre croissant de parties prenantes sont impliquées. Les intérêts publics poursuivis par le gouvernement ne coïncident pas nécessairement avec les intérêts personnels poursuivis par les individus. Par exemple, la relocalisation d’une base aérienne peut être considérée comme une protection des intérêts publics du point de vue de la sécurité nationale, mais en même temps, elle peut être perçue comme une violation des intérêts privés du point de vue des propriétaires fonciers. De même, des conflits entre les intérêts publics et les intérêts des propriétaires privés peuvent souvent avoir lieu dans le processus de mise en œuvre des politiques publiques. Il est sans doute plus souhaitable que les conflits publics soient gérés par le biais d’un accord social, mais il devient plus compliqué de résoudre les conflits à mesure que les types de conflits se diversifient et que diverses parties prenantes sont impliquées. 

Malgré le mécanisme de gestion des conflits géré par le Bureau de coordination des politiques publiques, le BAI a observé ces dernières années une augmentation des demandes d’audit sur des questions controversées sur le plan social, car les gens veulent que ces questions soient traitées par le système de demande d’audit du BAI. Par exemple, le système de demande d’audit a perçu de multiples demandes concernant le projet des quatre grandes rivières et le projet de construction du nouvel aéroport. La confiance du public dans le BAI permet au système de demande d’audit de servir de système de gestion des conflits publics.

Étude de cas relative à une demande d’audit

(Historique)

En 2017, 99 personnes vivaient dans le village de Jangjeom, dans la ville d’Iksan, dans la province de Jeollabuk, en Corée du Sud. 45 de ces 99 personnes étaient âgées de plus de 60 ans, et 22 de ces 99 résidents ont été diagnostiqués avec des cancers, dont 14 sont décédés. 
Une usine d’engrais, du nom de Geumgang Nongsan, avait été exploitée près du village et avait produit des engrais entre 2009 et 2016.

[Image 2] Plan du village

Source : Conseil d’audit et d’inspection (BAI)

Timeline

Fig. 4 : Chronologie de la demande d’audit du village de Jangjeom

Timeline

Source : Conseil d’audit et d’inspection (BAI)

    Chronologie

    • En avril 2013, un quotidien local a rapporté que neuf personnes avaient reçu un diagnostic de cancer et que quatre d’entre elles étaient décédées au cours des cinq dernières années. Cependant, le gouvernement municipal d’Iksan a répondu qu’il n’y avait pas eu de problèmes environnementaux causés par l’usine d’engrais.
    • Du mois d’avril 2015 à septembre 2016, les résidents se sont constamment plaints d’une odeur nauséabonde provenant de l’usine et ont déposé des pétitions auprès du gouvernement de la ville d’Iksan.
    • Du mois d’avril 2015 à septembre 2016, les résidents se sont constamment plaints d’une odeur nauséabonde provenant de l’usine et ont déposé des pétitions auprès du gouvernement de la ville d’Iksan.
    • En novembre 2019, le ministère a officiellement annoncé une relation épidémiologique entre l’usine produisant des engrais et les cancers signalés dans le village de Jangjeom.

    Demande d’audit et résultat

    • En avril 2019, les résidents ont demandé au BAI de réaliser un audit sur le gouvernement de la ville d’Iksan et le gouvernement de la province de Jeollabuk, car ils estimaient que les gouvernements avaient non seulement négligé leur devoir de superviser l’usine, mais qu’ils n’avaient pas non plus pris de mesures administratives jusqu’à ce que le village de Jangjeom soit perçu par les médias.
    • Le BAI a estimé que la négligence du gouvernement local avait contribué à la formation d’un cluster de cancers dans le village de Jangjeom, et a donc recommandé que des sanctions disciplinaires soient imposées aux fonctionnaires publics

    Conclusion :

    Le BAI vise à améliorer la transparence et l’impartialité de l’administration publique en encourageant les citoyens à participer et à surveiller l’administration publique du gouvernement national, des gouvernements locaux et des institutions publiques. En exploitant le système de demande d’audit, le BAI s’efforce également de satisfaire le besoin des citoyens en résolvant rapidement les questions qui perturbent la vie du public. Le système de demande d’audit contribue à garantir la transparence et l’impartialité du secteur public en répondant de manière appropriée et active aux demandes d’audit changeantes et en obtenant des résultats d’audit en temps opportun.

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